Région du Sahel : La ville de Djibo en détresse

Publié le mardi 25 août 2015 à 22h27min

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Région du Sahel : La ville de Djibo en détresse

Situé à environ 200 km de Ouagadougou, Djibo, chef-lieu de la province du Soum, risque d’être coupé du reste du pays si rien n’est fait par les autorités de la transition. A travers ces lignes qui suivent, un travailleur humanitaire dans la zone depuis l’afflux des réfugiés venus du Mali, lance un cri de cœur aux autorités de la transition, afin qu’elles se penchent sérieusement sur le cas de la route nationale N°22 reliant Djibo à Kongoussi. Même si le démarrage des travaux est prévu au plus tard en janvier 2016, l’arbre ne doit pas cacher la forêt, pense t- il.

La province du Soum sera bientôt coupée du reste du pays si rien n’est fait par les autorités de la transition. En effet, la route N°22 reliant Djibo à Ouagadougou en passant par Kongoussi est tout sauf praticable surtout en ces derniers temps.
Et pour cause, trois ouvrages sur le tronçon Kongoussi – Djibo sont en passe de céder. Il s’agit du pont de Woussé à une vingtaine de kilomètres après Kongoussi, le radier de Boulonga à une trentaine de kilomètres et le pont de Mentao à l’entrée de Djibo. Si rien n’est fait dans les plus brefs délais, ces ouvrages vont bientôt céder au grand dam des Djibolais.

Effectuer un voyage sur Ouagadougou à partir de Djibo est un véritable casse-tête « indien ». Et si vous avez la malchance de ne pas avoir un chauffeur expérimenté, vous courrez le risque de vous retrouver dans le décor. Empruntez la route de Djibo, vous verrez plusieurs véhicules cabossés, endommagés. Un conseil, si vous roulez à plus de 60 à l’heure, vous risquez de ne pas arriver à destination et soit d’endommager votre véhicule et dans le pire des cas de vous retrouver dans le décor.

Tenez, pour moins de 100 km entre Djibo à Kongoussi, il vous faut pas moins de trois à quatre heures de calvaire. Et quand vous avez la chance de gagner le goudron à partir de Kongoussi, vous poussez un « ouf » et devenez subitement un croyant improvisé et vous poussez un soupir comme pour dire « Dieu soit loué ».
Au-delà de cette situation, on pourrait dire sans ambages que la province du Soum semble la plus enclavée du pays. Située à environ 200 km de Dori, chef-lieu région de la région du Sahel, la province du Soum est très enclavée en dépit de ses potentialités économiques.
En effet, la province du Soum est l’une des trente premières provinces du Burkina mais l’une des rares à être enclavée. Outre cela, Djibo possède de surcroît le plus grand marché de bétail du Burkina et peut- être de la sous-région, puisque des commerçants de bétail viennent du Mali, de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Niger, du Togo et même du Nigéria. Sans tomber dans l’exagération, la plupart des gens le disent, « le problème de Djibo c’est le goudron sinon la province n’a rien à envier aux autres ».
Autrement dit, l’enclavement de la province est un handicap sérieux à l’essor économique de la province qui regorge d’énormes potentialités agro-pastorales et minières.
Mais ces derniers temps, l’état de la route a entrainé le ralentissement de l’activité économique notamment le marché de bétail s’étend à perte de vue. Autrefois bondé de commerçants venant de Ouagadougou, de Bobo-Dioulasso, de Ouahigouya et de Kongoussi ce marché n’est plus que l’ombre de lui-même. Sur plus d’une centaine de véhicules dix tonnes qui viennent habituellement au marché de bétail de Djibo, on a enregistré le mercredi 19 août 2015 seulement une dizaine de véhicules dix tonnes à cause du mauvais état de la route, soit une baisse de plus de 90% selon les statistiques habituelles.

Pour aller à Ouagadougou, à partir de Djibo, il y a trois options :
  1ère option : Djibo – Kongoussi : 200 km
  2è option : Djibo – Ouahigouya – Ouagadougou : 286 km
  3è Option : Djibo – Dori – Ouagadougou : 560 km
Mais des trois options, la première à savoir Djibo – Kongoussi est la plus pratiquée parce que la moins longue pour rallier Ouagadougou. L’autre alternative pour aller de Djibo à Ouagadougou est le tronçon Djibo – Titao – Ouahigouya- Ouagadougou longue d’environ 300 km dont une centaine de pistes rurales. Mais le hic est que est coupée depuis quelques semaines car le pont de Tougou, un village situé à une trentaine de kilomètres de Ouahigouya a cédé. Les candidats de Djibo et de Titao aux concours de la fonction publique qui devaient composer dans le centre de Ouahigouya en ont fait les frais. Après avoir veillé et prié plus de 72 heures à Tougou devant le pont pour espérer que l’eau diminue afin qu’ils aillent composer à Ouahigouya, ont dû faire demi-tour et surseoir aux concours de la fonction publique. Deux personnes auraient malheureusement perdu la vie. Elles auraient tenté de forcer le passage et auraient été emportées par le courant d’eau sous le regard impuissant des usagers de la route et des sapeurs-pompiers venus de Ouahigouya.

Si vous avez des urgences à gérer à Dori, chef-lieu de la région du Sahel, à défaut de faire le déplacement à moto avec tous les risques que cela comporte, il vous faut passer par Ouagadougou, ce qui est devenu risquant à cause des ponts en passe de céder. Et si vous empruntez le tronçon Djibo- Dori, vous n’avez pas moins de 5 à 6 heures de route et quelle route ! Certains radiers en cette saison hivernale sont impraticables surtout à Belehedé, Gorgadji, Bombofa et Gaik N’Gota, entre autres. Il faut patienter des heures sinon rebrousser chemin.

Autres faits, la plupart des ouvrages au niveau de la région du Sahel sont des radiers et si vous avez la malchance qu’une pluie vous trouve sur la route, il faut parfois éviter de s’aventurer dans un radier. Il est recommandé de patienter pour attendre le passage de l’eau ou de rebrousser chemin pour au moins avoir la vie sauve.
En plus de 27 ans de règne, l’ex président Blaise Compaoré avait promis le bitumage de la route Djibo – Kongoussi mais cela n’a jamais vu le jour. Et la transition pouvait soulager le calvaire de la population chaleureuse de Djibo qui souffre le martyr à chaque fois qu’il faut faire un déplacement sur Ouagadougou.

Il faut au passage saluer les quelques rares compagnies de transport qui empruntent le tronçon Djibo – Kongoussi et Djibo - Ouahigouya . Croyez-moi, c’est plus du social que du commerce. Parfois, il faut 48 heures pour rallier Ouagadougou qui est seulement à 200 km de Djibo. Les premiers responsables de ces compagnies ont menacé plusieurs fois d’arrêter d’emprunter le tronçon mais ils semblent avoir compris le supplice des Djibolais. Voilà des gens qui doivent être proposés à la décoration par les plus hautes autorités du pays.

Au regard des contraintes liées au développement social et économique, on peut se demande si Djibo n’est pas victime des plaies d’Egypte infligées à l’Egypte dans la Bible ? De 2014 à 2015, des attaques aviaires dans la plupart des communes de la province, les aléas climatiques provoquant régulièrement une mauvaise compagne agricole, l’impact de l’afflux des réfugiés, les éboulements dans les mines artisanales, l’enclavement de la province, la province la plus éloignée du chef-lieu de la région, les faibles résultats scolaires, le manque d’eau même en période hivernale.

Au demeurant, en attendant les travaux de bitumage prévus pour fin décembre, il est plus qu’impératif de palier l’urgence en procédant à la réparation de ces ouvrages surtout les ponts de Woussé et de Mentao où il n’y a pas de déviation possible si jamais ces deux ponts venaient à céder. Les populations vous sauront gré si jamais vous prenez à bras le corps le désenclavement de la province avant la fin de la transition.

La campagne politique pour les élections présidentielle et législatives d’octobre 2015 c’est pour bientôt. Chers prétendants à un mandat électif, les populations du Soum vous attendent de pied ferme. La priorité des priorités est le désenclavement de la province du Soum qui passe par le bitumage de la route Djibo- Kongoussi (100 km), Djibo – Ouahigouya (106 km) et Djibo – Dori (200 km). Donc à vos marques.

Un amoureux de la belle cité de Djibo

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